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7 BIENFAITS du coronavirus COVID-19

Surprendre Par Eric Le Braz 17 mars 2020

7 BIENFAITS du coronavirus COVID-19

Coronavirus Covid-19

pixabay
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Nous sommes en guerre. OK. Mais seuls ceux qui ont un uniforme ou une blouse blanche montent au front. Pour les derniers de cordée, notre mission consiste grosso modo à ne rien faire. Et à préparer à la paix qui vient….

Quand j’ai reçu ce SMS  de Vincent y a 7 jours « J’ai pensé à  toi pour un article de 7x7 : les 7 bienfaits du Coronavirus. Ça te tenterait ? », j’ai d’abord botté en touche. Je ne souhaite la mort de personne, surtout pas la mienne, et comme à l’approche de la soixantaine, je frôle le nouvel âge pivot des coronavictimes, j’ai très peur de me porter malheur. D’autant que depuis que j’ai fréquenté la peste pulmonaire, j’ai comme une aversion profonde pour les maladies mortelles qui se transmettent par les postillons.

Mais après 14 jours d’incubation, j’ai finalement accepté la proposition. Car j’en ai ma claque d’être contaminé par une centaine de news anxyogènes chaque jour, d’avoir l’impression de vivre dans une mauvaise série post-apocalyptique, de devoir remplir des ausweiss à la main pour acheter le pain et de tester la décroissance à domicile en attendant le grand effondrement. 

La bonne nouvelle, c’est que j’ai enfin le temps d’écrire sur la face éclairée de la force qui terrasse la planète puisque toutes mes missions sont coronannulées jusqu’à la saint glinglin. Et tu sais quoi Camarade confiné - et n’y vois aucune obscène provocation : j’ai décidé de me réjouir de tout ce bazar car c’est bien meilleur pour la santé ;-)

1 Covid-19 : On sauve (enfin) les espèces menacées

7 BIENFAITS du coronavirus COVID-19

Pangolin

Wikimedia Commons

C’est un paradoxe à savourer longuement. Le tueur en série présumé qui a déclenché l’épidémie en se faisant bouffer par un gastronome de Wuhan va sauver la vie de ses congénères en tuant des milliers d’humains. Au moins. 

En fait, on n’est pas sûr d’avoir identifié l’espèce qui a transmis le coronavirus. Mais que ce soit un pangolin, un serpent, une chauve-souris ou un partenariat entre l’une qui aurait mordu l’autre, ayons au moins confiance dans les capacités d’un Etat très, très, très démocratique comme la Chine pour respecter désormais la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites). Et interdire définitivement l’importation de viande de brousse africaine dans ses marchés où les chips d’écailles de pangolin étaient vendus un euro le gramme… 

Maintenant, on peut aussi espérer qu’on passe au stade 2 de la prise de conscience en arrêtant de détruire l’habitat des animaux sauvages et en les laissant vivre en paix loin de nous. Car plus ils se rapprochent de nos assiettes comme de nos poubelles, plus ils sont susceptibles de nous transmettre des virus bien plus sauvages qu’eux…

2 Covid-19 : On ne serre plus la main des connards

Finies les mimines moites, les bises qui piquent ; adieu les smacks un peu beurk because le surdosage de parfum à deux balles, ciao les mâles dominants qui t’écrasent les phalanges pour te montrer qu’ils pourraient faire la même chose avec tes castagnettes…

Grâce au Covid-19, on n’a plus le droit de serrer la pogne ou poser ses lèvres sur les joues de quelqu’un qu’on déteste. Et si jamais on est réquisitionné en première ligne pour bosser avec un abruti, on peut se contenter de lui taper les coudes. Et de lui en mettre un dans l’œil, pendant qu’on y est.

3 Covid-19 : On dit shit au gaz de schiste

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Forage de pétrole de schiste

pixabay

Covid-19, c’est le nouveau pseudo de Greta Thumberg. Depuis que le virus se propage, le CO2 se disloque. Les télétravailleurs laissent la voiture au parking. Les fermetures de frontières plaquent les avions au sol. Les usines sans pièces détachées ne crachent plus de fumées. Et en Chine, « la Baisse de la pollution va épargner plus de vies que le virus en aura coûté ». Bref, la planète confinée provoque une baisse de la demande de pétrole, ce qui déclenche une chute des cours confortée par la Russie et l’Arabie Saoudite pour emmerder les Etats-Unis. 

C’est réussi. Car quand le prix du baril s’effondre parce que la planète tousse, le foreur texan qui exploite du gaz et du pétrole de schiste finit au bord de l’apoplexie. Balafrer la terre, c’est hyper rentable quand le brent est à 70 dollars. Mais à 31, tu craches tes poumons.  Et quelques faillites sont prévisibles. 

Certes, quand l’économie repartira, le baril barrira de nouveau. Mais avec la crise maousse qui se profile, les pétroliers ne risquent pas de renouer avec des cours stratosphériques qui nous pompent l’air….

4 Covid-19 : On redistribue les richesses

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L’épidémie est-elle de gauche ? Elle est au moins keynesienne si l’on en croit l’étonnante nouvelle rhétorique d’Emmanuel Macron le 12 mars 2020 pour qui « l’alimentation et la santé » ne peuvent être soumis aux impératifs du marché. 

Et le chantre de la startup nation de défendre un modèle d’Etat providence  « quoi qu’il en coûte ». Certes comme le remarque Romaric Godin dans Mediapart, « Une règle du néolibéralisme pourrait être que dans les crises, il n’y a pas de néolibéraux. L’idéologie semble suspendue. ». Le capitalisme sait générer ses propres anticorps. Mais pour redistribuer les parts du gâteau, il n’est pas nécessaire que Piketty remplace Le Maire.  Depuis le New Deal de Roosevelt, les « flashs keynesiens » permettent de rééquilibrer les plus grandes injustices.

Et les tsunamis pandémiques n’ont pas besoin de prix Nobel d’économie pour réussir à répartir les richesses. Méditons les leçons de l’histoire : la peste noire qui a fauché un européen sur trois entre 1346 et 1348 devrait nous redonner le moral. Car si on réchappe à une épidémie meurtrière, l’avenir est à peu près radieux, surtout si vous végétez au bas de l’échelle sociale. Paris est devenu trop cher ? Guerre ou épidémie, l’immobilier chute après chaque crise majeure. Les prix des loyers ont ainsi diminué de 75 % après la grande peste nous apprend l’économiste Jacques Friggit.

La loi de l’offre et de la demande ne joue pas toujours en faveur des plus riches, surtout quand la valeur de leur capital fond avec la crise financière et économique. Ce qui ne tue pas rend plus fort (les pauvres) et la diminution de la main d’œuvre se traduit par une hausse des salaires.

Depuis la peste noire, on sait que les plus démunis sont les plus grands profiteurs du malheur des autres, ce qu’explique limpidement l’historien Peter Frankopan dans une interview au Point :  « Le dépeuplement a eu notamment pour effet d’augmenter considérablement le prix du travail. Les loyers sont devenus moins chers, les baux pour les paysans plus longs. (…) les jeunes ont pu consommer plus que la génération précédente, consommation dopée par le fait qu’ayant fait l’expérience de la mort elle était moins tentée par l’épargne. Ils étaient d’ailleurs intéressés par la mode, ce qui provoqua le développement rapide de l’industrie textile européenne ».  Cette redistribution des cartes et de l’argent a débouché sur la Renaissance (après une petite guerre de cent ans entre les deux, certes)...

L’humanité a connu le même phénomène après chaque crise meurtrière, ainsi les années folles qui succédèrent à la première guerre mondiale et à la grippe espagnole… Bref, mettez le champagne au frais, on le débouchera avec plaisir si on ne nous met pas en bière.

5 Covid-19 : On donne du temps au bon temps

En 1665, alors que la peste est en train de décimer Londres, le jeune Isaac Newton se réfugie dans le manoir familial de Woolsthorpe. Et c’est pendant ce confinement, qu’il va recevoir une pomme sur la tête et écrire la théorie universelle de la gravitation. On voit ce qu’il nous reste à faire, hein !

Combien de théories, combien de chefs d’œuvres… combien de bébés vont naitre après ces semaines/mois de réclusion ? C’est pour la plupart d’entre nous une expérience inédite, une sorte d’emprisonnement en semi-liberté où le télétravail ne va pas occuper tout notre temps.

Alors qu’il y a tant à faire : ranger et épousseter la bibliothèque, en profiter pour relire La peste de Camus ou Je suis une légende de Matheson, installer le composteur, réparer l’aspirateur, repeindre la chambre du petit, jouer à Plague Tale, revoir l’intégrale de Myazaki sur Netflix avec ses enfants, profiter des pittoresques zombies coréens de Kingdom quand ils sont couchés (les enfants), s’initier à de nouveaux tajines tous les trois jours (« la cuisine va redevenir une valeur » a dit Boris Cyrilnuk), apprendre à faire un site en ligne ou prendre des cours d’histoire sur Youtube, réviser ses tables de multiplication et l’orthographe sans correcteur avec sa progéniture, dessiner une #coronamaison avec Pénélope Bagieu, essayer de taper la prochaine intervention de Macron en direct sans faire de « Frangnaise, Frangnais », écrire un haïku par jour, tenter de méditer plus de 15 secondes tous les matins, discuter enfin avec ses ados et reprendre la peinture à l’huile, la cuisine au beurre, le tricot point de riz, le mandala tibétain, le yoga nidra et le massage réciproque si on y a droit. 

Elle est pas belle la vie tant qu’on ne l’a pas perdue ?

6 Covid-19 : On écoute les savants

C’est Emmanuel Macron qui donne l’exemple. Tout Jupiter qu’il est, il ne prend plus une seule décision sans consulter Esculape (le Dieu de la santé et de la Médecine chez les Romains pour les mauvais esprits qui rechercheraient des mauvais jeux de mots). Le comité scientifique est devenu l’alpha et l’oméga du quinquennat : « Un principe nous guide pour définir nos actions (…) : c'est la confiance dans la science » a-t-il martelé en s’inclinant pour toutes ses décisions devant le comité scientifique de suivi. 

L’exemple vient de haut et en dépit de toutes les fake news qui prolifèrent sans trop de succès sur les réseaux sociaux, nous sommes finalement tous devenus consentants pour suivre sans sourciller les conseils avisés des sachants si décriés. Il ne reste plus qu’à espérer que toutes ces mesures de bon sens vont perdurer à la sortie de la crise et qu’on continuera à éternuer dans le coude pour éviter de se refiler la grippe et à se laver les mains pour ne plus choper la gastro.

Et aussi que les dirigeants comme l’ensemble des survivants continueront à écouter les scientifiques quand ceux-ci leur expliquent comment éviter une autre catastrophe bien plus prévisible : celle du réchauffement climatique...

7 Covid-19 : On est tous égaux face au virus

Tom Hanks en quarantaine, Frank Riester sur le carreau, Justin Trudeau confiné… et ça ne fait que commencer. Footballeurs, patrons du Cac 40, héroïnes de télé-réalité, profs d’universités, présentateurs vedettes… tous les gâtés de la vie ont autant de risques d’attraper le coronavirus que la concierge, l’éboueur, le SDF et la caissière de Leader Price.  De la prison de Fresnes à la salle des Quatre colonnes,  puissants et misérables sont presque sur un pied d’égalité : « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés ».

Des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des blancs, des noirs, des musulmans, des catholiques, des athées, des féministes, des machos, des gilets jaunes, des gendarmes mobiles, des adeptes alsaciens ou sud coréens d’églises obscures…   Tout le monde peut y passer. Surtout ceux qui disent des conneries sur son compte car Covid-19 a un humour noir redoutable. Ainsi, l’imam iranien  Hadi Al-Modarresi qui avait déclaré que le coronavirus était “un acte d’Allah” contre les Chinois pour leur traitement, leur moquerie et leur manque de respect envers les musulmans et l’islam, a attrapé le virus à son tour. C’est celui qui dit qui y est. 

Le coronavirus est un gamin mal élevé qui ne connait pas les préséances. il est mal poli, ne dit jamais bonjour à la dame et s’invite chez tout le monde sans frapper, pour frapper. En un sens, c’est un formidable accélérateur d’égalité. Depuis qu’il n’y a plus de gardiens de phares et que les anachorètes sont has been, il n’y a plus que trois personnes qui peuvent s’estimer totalement protégés du virus : Andrew Morgan, Jessica Meir et Oleg Sripochka qui orbitent dans l’ISS depuis plus de six mois. On imagine la trame d’un bon huis clos SF si on disparait tous avant leur retour… 

Mais je m’égare. Le thème de ce septième bienfait, c’était l’égalité face au Covid-19. Mais en quoi ce nivellement par le bas est-il un bienfait, me diras-tu entre deux quintes ? C’est que dans ce monde où tout est censé devenir prédictible, il reste toujours d’imprévisibles et destructeurs cygnes noirs qui viennent fracasser les plus belles courbes. Aucune intelligence artificielle n’a anticipé cette épidémie et celle qui a prévu son extension, la startup canadienne Bluedot, a livré sa modélisation le 31 décembre, un mois et demi après le premier cas connu. N’importe quel spectateur de Contagion, le film prémonitoire de Steven Soderbergh, aurait pu en faire autant.

L’amère beauté du cygne noir, c’est de nous rappeler que nous, les maîtres du monde, les phénix des hôtes de ces bois, les bouffeurs de pangolins, les cadors de l’évolution, les médailles d’or de la chaîne alimentaire, nous sommes de pauvres petits tas de chair riquiquis, fragiles et terriblement mortels. 

Nous passons des nuits entières devant Netflix, OCS ou Canal+ à regarder des inconnus mourir pour nous. Mais que valent les 174 373 morts de Game of Thrones (oui , oui, y en a qui se sont amusés à les compter) à côté de la mort d’un proche ou de notre propre fin. 

La mort est l’ultime tabou qu’on ne cesse de mettre en scène dans des fictions grand guignolesques pour mieux l’enfouir dans notre vie. On ne sait plus en parler et on ne sait plus quoi dire à ceux qui y sont confrontés. Au point qu’il nous faut fréquenter des « cafés mortels » pour parler d’elle dans une scénographie qui rappelle celles des alcooliques anonymes. Je vous conseille l’expérience, y en a aussi à l’heure de l’apéro, quand on aura le droit de ressortir, vous n’en mourrez pas. Moi-même, je fréquente les cafés mortels de Bordeaux et je ne m’en porte pas plus mal… pour l’instant.

Merci de votre attention, vous pouvez retourner sur France Info. 

Confinement vôtre

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