Sept enseignements des Chartreux à appliquer dans le monde réel

Les Chartreux ne suivent pas de règles, mais des coutumes évolutives qu’ils appellent Statuts. En tête de liste : l’abstinence de viande.

Grands amateurs de viande, les Français ont chassé les Chartreux en 1905 (sous prétexte de laïcité) pour continuer à manger leur 89 kg par an et par personne contre une moyenne européenne de 81,9 seulement.

Les pères se sont réfugiés pour la plupart en Angleterre et en Suisse. Et les Français ont continué à manger leur viande en râlant contre les 10 000 litres d’eau et les 7 kilos de céréales que coûte chaque kilo de bœuf doré au four !

Imaginez que vous ayez dix minutes de parole tous les dimanches et trois heures les lundis ; et imaginez que le reste du temps est dédié à des choses qui vous éclatent vraiment !

Ça éviterait des années d’analyse chez le psy et beaucoup de blabla…

Parler moins, c’est aussi écouter plus. Aujourd’hui les scientifiques affirment même que ça procure de la joie et aide à la concentration. Dans le silence le système sensoriel se détend  et l’écoute s’affûte.

Chez les Chartreux on entend seulement les oiseaux,  les chants et les clochers ! Eh oui, j’ai oublié de vous dire : ici, il y a deux sons de cloche.

Le clocher qui surplombe l’église règle les offices de la journée. Le second indique l’heure.

Après tout, ne dit-on pas, qui n’entend qu’une cloche n’entend qu’un son ? 

L’architecture de la Chartreuse a été pensée dans le souci de répondre au mieux aux différentes activités du lieu et de respecter le désir de retraite des pères. Qu’à cela ne tienne ! Une architecture nouvelle a été inventée.

Selon Patrick Allindré, responsable de l’ouverture au public à La Chartreuse de Neuville, il s’agit de l’organisation d’un vaisseau spatial. « A la base, les machines : dans le monastère, ce sont « les obédiences ». Elles rassemblent la ferme, les ateliers et espaces techniques (menuiserie, forge…). Bien que partie intégrante du bâtiment, elles sont en avant de celui-ci et presqu'en contact avec le monde extérieur et ses bruits ».

Les frères sont, quant à eux, en charge du bon fonctionnement du vaisseau. Au bout du vaisseau, les pilotes : « Il s’agit des Pères qui vivent rassemblés autour du grand cloître,  la « maison haute », et qui consacrent leurs heures et leurs vies à la recherche d’un absolu. Les frères convers, chargés des tâches matérielles, vivent en contrebas des ermitages. »

Quant au pilotage automatique, il ne reste plus qu’à prier  pour que ça marche !

Que celui qui n’a jamais rêvé de s’éloigner de la ville et d’aller vivre à la campagne, loin de la troïka "métro-boulot-dodo", leur jette la première pierre ! 

Les Chartreux s’installent dans des lieux appelés « désert ». Loin de l’agitation des villes, du commerce et de tout ce qui peut polluer l’esprit et corrompre l’âme. Ils s’éloignent pour aller vers ce qu’ils considèrent leur vocation.

Vivre dans de grands espaces et renouer avec la nature, mieux respirer, reposer ses oreilles, la vie est dans le pré !  

Garder une recette secrète pendant plusieurs siècles… vous voyez bien que ça sert de faire vœu de silence !

Aujourd’hui les frères Chartreux, derrière leurs ordis, dosent leur élixir en toute discrétion, même si c’est  une  entreprise  laïque qui se charge de la production.

Selon la tradition, seuls deux pères  possèdent la fameuse recette de 130 plantes aux vertus dynamisantes et digestives. Et inutile d’essayer de les kidnapper. Ils ne parleront pas même sous la torture.

Les ermites passent la majeure partie de leur temps dans leurs cellules. Ils écrivent beaucoup et il est très rare que leurs travaux soient signés. Il ne faut surtout pas flatter leur ego ! (Les droits d’auteur n’étaient pas passés par là non plus). Dans l’ermitage, une pièce est dédiée aux travaux manuels. Dans ce laboratoire  de recherche, les pères coupent le bois et s’adonnent souvent à une activité d'ébénisterie pour garder le contact avec le monde physique. Les sculptures sont détruites à la fin de l’ouvrage et le chef-d’œuvre jamais montré.

N’est-ce pas conceptuel tout ça ?

Si on pouvait appliquer ces préceptes dans les biennales d’art contemporain et faire disparaître quelques croûtes en toute discrétion…

Après avoir chassé le diable à Vauvert (eh oui, ils étaient là aussi !), les Chartreux se sont concentrés sur l’arboriculture et ont créé de remarquables espèces horticoles. Aujourd’hui encore, on continue à étudier et à développer leurs techniques et savoir-faire.

Pour les gourmands, les frères qui ont fait vœu de pauvreté ont inventé de nouvelles espèces fruitières comme la poire Catillac au goût légèrement acidulé, ou encore la pomme Fenouillet utilisée généralement pour de délicieux desserts. Alors merci qui ?