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7 raisons de retourner voir @Springsteen

Recommander Par Hervé Resse 13 juillet 2016

7 raisons de retourner voir @Springsteen

The Boss, 66 piges, à Paris le 11 juillet, still born to run

BERTRAND GUAY / AFP
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Bruce et sa clique ont posé armes et bagages à Paris, ce lundi 11. Nous y étions pour vous – pas QUE pour vous-. Et nous y sommes retournés le mercredi 13 juillet, veille de fête nationale.

E-Street Band au complet occupera de nouveau cette place-forte du marketing qu’on dénomme désormais « Accor Arena ». Le lieu naguère était connu sous le nom de P.O. Bercy : la soirée de lundi témoigna que des progrès demeurent à accomplir par la nouvelle équipe, pour recevoir sans faille le plus grand groupe de rock n’roll de cette damnée planète monde. L’accueil du public y relève pour l’heure d’un bordel sans nom. Et nous aurons eu droit, au cours du rappel, à une panne générale de courant d’un bon quart d’heure, où nul (ni le groupe, ni le public) ne lâcha pour autant l’affaire… Certains y auront trouvé leur compte, le Boss meublant l’attente en distribuant autographes et selfies. Qui d’autre, quoi?...

Donc retour sur les lieux du crime, mercredi. Essaye encore, monsieur Accor.

Fan du Boss depuis plus de 30 ans, ayant plus de concerts à son actif que de doigts dans les deux mains, j’ose avoir un peu fait la fine bouche, ce lundi. Quoi ? Oser des réserves ? Etait-ce seulement possible ? L’auteur de ces lignes a d’abord songé affronter les scuds que lui auraient immanquablement balancés les fans hard-core. Insultes, avanies, menaces. Sauf que tenté de la jouer « qui aime bien châtie bien », après dix lignes, la perspective d’y retourner le titillait déjà...

1 On y va, parce qu’on a pris sa place, tiens...

… Et quand on aime, on compte pas !

Tout en ce monde est affaire de RITUEL. Ca commence avec les bières bues avant le show. Le classique débat sur LE morceau qui ouvrira la set-list. Tu te souviens, au Parc des Princes, 2008 ? Adam Raised a Cain, pour commencer !!! Le jouera-t-il, cette fois ? Cette année le Boss fait deux soirées ? Eh bien, tu prends deux places, et tu fais comme chaque fois : tu rameutes les vieux potes. Voilà trente ans que ça dure, et on ne voit pas de raison d’arrêter. Bruce est de ces artistes qui sollicitent en nous, comme peu d’autres, l’obsessionnel et le compulsif. D’aucuns ont le même problème avec Dylan. Parfois, ce sont d’ailleurs les mêmes… 

Le marketing ne s’y trompe pas. Les places sont vendues « bonbon ». Les concerts en CD ou Mp3 se multiplient sur le net, rien que pour la dernière tournée on en est à une douzaine. Pour 20 euros, le Brucemaniaque présent à l’Accor Arena peut aussi s’offrir une carte avec code à gratter, pour télécharger « légalement » le concert qu’il a vécu en vrai. There’s no business like show-business. « Ce n’est pas la musique c’est le pognon, je n’ai aucune illusion sur ce sujet », précisait d’ailleurs, franc du collier, le Patron lors d’une interview reprise dans un bouquin.

2 On y va, parce qu’il y a ceux à qui on pardonne tout

Abordons le sujet par sa face touchy : la plupart des observateurs s’extasient sur les concerts springsteeniens, durant chaque fois trois heures et demie. Ils saluent l’exploit, qui n’est certes pas mince. A 66 ans, tout de même, quelle santé ! Il a toujours aimé les concerts marathon. Souvenons-nous de nos jeunes années : après 3 heures de scène, il nous interpellait hurlant : « Fatiguééés ?... Fatiguéééés ???... One Two Three Four… » Et en voiture Simone, on repartait pour une heure de plus.

Osons le dire, ces temps sont révolus. Si les concerts durent aussi longtemps, c’est surtout parce que chaque final de morceau rapide donne lieu à des fausses fins sans fins, avec force roulements de caisses du métronomique Max Weinberg, qui doit être payé à la frappe. Au concert de lundi, la ficelle pesait une corde à nœuds. Des morceaux qui jadis duraient 5 ou 6 minutes s’étalent désormais sur 9 ou 10. Le public n’y trouve guère à redire : il baigne dans son bonheur collectif, fait les chœurs comme il a toujours fait, sur Badlands ou Hungry Heart. Mais pour peu qu’on ose s’extraire un poil du mouvement panurgien, des passions de la foule (comme disait Descartes. Ou France Gall, on ne sait plus…) on pourrait s’ennuyer un brin. Mais on parle du Boss. Alors nos inconscients font mine de n’avoir pas pigé l’astuce. Comme ils ont feint de ne pas entendre les aigus foirés de McCartney, le 30 mai dernier, en ce même lieu. Ceci dit, quand même, ce « Shout » qui n’en finissait pas, lundi, c’était limite, limite. Y a pas marqué pigeon, comme on disait dans mon quartier

3 On y va, parce qu’il s’agit d’une histoire de famille dont on ne se lasse pas

Au concert du Boss, la foule prend des allures de « communauté » unie, et souriante. Chacun connait tous les morceaux, y compris les paroles. On y croise ses propres clones, mêmes bedaines affublées des mêmes T-Shirts à la gloire du Taulier. On y salue telle plume acérée du football, qui ne fait pas mystère de son autre passion. Le rituel Brucien est comme une réunion de famille qui reviendrait chaque année ou presque, mais qu’on n’aurait simplement jamais l’envie de sécher. On me rétorquera que cela vaut exactement pareil  pour… Johnny. Céline Dion. Mylène Farmer. A quoi je répondrai qu’il y a des comparaisons qui ne grandissent guère leurs auteurs. Tous les fans de Springsteen sont un peu frères de sang. Point barre. [Ici, spéciale dédicace pour Daniel A. ; pour l’éternité].

4 On y va pour les passages obligés

Un concert sans Badlands ? Sans Because The Night, The River, Born to Run ? Autant imaginer un gouvernement socialiste sans 49.3… Tous ces moments rêvés, espérés, participent de la magie du truc, ce bonheur du RENDEZ-VOUS. Avec ce shoot d’adrénaline que ressent chacun aux premières notes de l’intro qu’il attendait,  Springsteen vous donne ce sentiment rare, être pleinement vivant, et dans l’instant présent. Des centaines de psys pondent des centaines de bouquins pour expliquer qu’il faut savoir le vivre, ce fameux « instant présent ». Que là,  serait la clé du bonheur. Tout fan du Boss sait qu’il y parviendra au moins trois fois durant chaque concert, soit plus que dans une année entière de vie quotidienne, sans relief ni surprise. Dîtes moi donc quel prix cela vaut-il ? 

5 On y va aussi dans l’espoir d’une surprise

Springsteen parle le langage de son public. Il sait que celui-ci se nourrit de « grandes espérances». Chacun a dans la tête ce morceau qu’il n’a jamais entendu jouer en scène, qu’il rêverait d’entendre ne serait-ce qu’une fois. Lundi, au moment même (véridique) où je songeais que j’assistais « peut-être » à son concert le plus décevant, retentirent les premières notes de Tougher Than The Rest, morceau majeur d’un album mineur (The Tunnel of Love), titre que j’adore et que jamais je n’avais entendu live

C’était une ces synchronicités, chères à Carl Gustav Jung: ces croisements de hasard qui ne font sens que dans la mesure où l’on veut leur en donner un ; et qui prennent exactement ce sens qu’on veut leur donner. Or à cet instant-là, le message subliminal me parvint parfaitement clair : « boude pas ton plaisir, mec. La vie est courte. Et un concert du Boss, c’est forcément un bon moment à vivre. L’instant présent, on t’a dit ». 

6 On y va pour Nils Lofgren, l’ultime guitar-hero

Le rock sans guitar héro, c’est comme un gouvernement socialiste sans… Je l’ai déjà faite. Dans un concert du Boss, il y a nous l’avons dit ce passage obligé par la case Because The Night. Ecrit par Bruce, finalisé par la merveilleuse Patti, joué par chacun d’eux depuis bientôt 40 ans. Ce titre sublime est pour l’ancien guitariste du Crazy Horse de Neil Young. Le Boss le débaucha quand le compère Steven Van Zandt avait ses envies de carrière en solo. Il tient là l’occasion d’un numéro qui me tire chaque fois des larmes. 

Dans ce morceau lyrique à souhait, il part dans un de ces solos qui à eux seuls sont l’épopée du rock : échevelé, ensorcelé, diabolique, ésotérique pourquoi pas, puisque se terminant dans une transe de derviche tourneur. A ce moment précis du concert, Nils Lofgren est le plus grand guitariste vivant. Ses notes sont une mythologie électrique éphémère, qu’il faut capter, encore et vite, le temps qu’elle passe.

7 Et parce que nous sommes nés pour courir

J’étais parti pour maugréer sur ces premiers assauts visibles, et plus encore, audibles, du temps et de l’âge, sur l’icône du New-Jersey… Et à mesure que me venaient les idées, je réalisais comme il ne sert à rien de jouer les ronchons. Car le temps fuit, et « les belles années passent vite », comme disait Léo Ferré. Tant que nous sommes en vie, que le Boss roule la sienne, il me trouvera donc sur sa route, avec d’autres, avec tous les autres. Et nous ferons, comme si nous avions avec nous, l’éternité pour courir.

8 7 + la mise à jour après le concert du 13 juillet...

JE LE SENTAIS. IL Y AVAIT TROP d'IMPERFECTIONS DANS LE CONCERT DE LUNDI... HIER AU SOIR, C'ETAIT MAGIQUE, TERRIFIQUE, MIRIFIQUE, TELLURIQUE, APOCALYPTIQUE. Le Boss avait repris l'ascendant, le groupe était au cordeau. Ce fut juste une soirée d'anthologie.

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