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7 raisons pour lesquelles la CHARGE MENTALE n’est pas un MYTHE

Anticiper Par Julie Gielen 29 juillet 2025

7 raisons pour lesquelles la CHARGE MENTALE n’est pas un MYTHE
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Penser à tout, tout le temps, pour tout le monde. Sans que personne ne le demande. C’est ça, la charge mentale. Une forme de travail invisible, largement portée par les femmes en couple hétéro. Elle consiste à anticiper, planifier, organiser la vie quotidienne du foyer. Elle commence dès le réveil et ne s’arrête jamais : faire la liste des courses dans sa tête en réunion, penser au vaccin du petit dernier en cuisinant, se rappeler qu’il manque du papier toilette… sans jamais poser le stylo de cette To-Do List mentale.

Ce fardeau silencieux, souvent minimisé ou tourné en dérision, n’a pourtant rien d’anecdotique. Il est la conséquence directe d’un déséquilibre dans la répartition des responsabilités domestiques et parentales. Et il a des impacts concrets : sur la santé mentale des femmes, sur leur carrière, sur leur charge cognitive, et sur les inégalités de genre en général.

Et si vous pensez encore que c’est juste une histoire de personnes “maniaques du contrôle”, de “féminité” ou de couples mal organisés, asseyez-vous confortablement, parce que cet article va vous prouver que la charge mentale est une réalité sociale, mesurable, destructrice… et parfaitement évitable.

Voici donc 7 raisons surprenantes et documentées pour lesquelles la charge mentale n’est ni un caprice, ni un concept à la mode, mais bien un symptôme d’un déséquilibre structurel. Et une invitation urgente à réécrire les règles du jeu.

1 Un travail scientifiquement prouvé… mais non-reconnu

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Oubliez l’idée selon laquelle “penser à la lessive, c’est pas la mer à boire”. En réalité, les recherches en neuroscience montrent la différence entre charge physique et charge mentale. Cette dernière se définit comme une surcharge cognitive liée à la gestion quotidienne des tâches : planification, anticipation, stockage d’informations… Toutes ces micro-activités invisibles brûlent de l’énergie cérébrale.

Marie Lacroix, neuroscientifique et co-fondatrice de la société Cog’X, définit la charge mentale comme un effort continu de concentration, d’adaptation, de gestion d’informations. Elle émerge notamment quand il y a trop d’informations à brasser, et ce même si aucune n’est complexe.

Malgré l'accès croissant des femmes à l'emploi, la responsabilité principale du travail familial et bénévole leur incombe toujours. Ce travail invisible regroupe toutes les tâches domestiques, de soin (aux enfants, personnes âgées, malades) et de soutien psychologique. Cette charge mentale revient majoritairement aux femmes, quel que soit leur profil professionnel : mères au foyer, universitaires, étudiantes, salariées ou élues.

Dans un article devenu célèbre paru dans The Conversation, Laurence Charton, sociodémographe à l’INRS, explique que la charge mentale est « un travail non rémunéré, ou peu, sous‑valorisé au regard du travail accompli et de ce qu’il peut apporter à un proche, un organisme ou une institution. » Ce travail, majoritairement réalisé par les femmes, n’est en effet pas reconnu dans nos systèmes de valorisations sociale et économique. En 2011, le BIT estimait pourtant la valeur économique du travail invisible féminin à environ 8 000 milliards de dollars par an. Il reste malgré tout exclu des indicateurs officiels comme le PIB, ce qui renforce son invisibilité.

2 Un mal social qui s’installe très tôt

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Les femmes ne sont pas “naturellement” plus organisées, attentionnées ou douées pour penser aux autres. Ce n’est pas inné, ce sont des comportements induits par l’environnement, la culture, l’éducation. Aucune “caractéristique biologique” ou psychologique derrière la charge mentale des femmes hétéros.

Nous grandissons avec une injustice structurelle et précoce : la socialisation différenciée des enfants selon leur genre. La socialisation genrée est le processus par lequel les individus apprennent, dès l’enfance, les comportements, attitudes et comportements liés au fait d’être une femme ou un homme dans une société donnée. Ces “rôles de genre” sont inculqués très tôt via :

- les jouets (poupons pour les filles, figurines de héros pour les garçons par exemple), les récits et livres jeunesse (princesses passives vs. héros aventureux, toujours par exemple),

- les injonctions éducatives (on félicite une fille “gentille” ou “aidante”, on encourage un garçon “autonome” ou “ambitieux”),- les modèles parentaux : les filles sont encouragées très tôt à jouer les “petites mamans”. On applaudit moins volontiers un petit garçon qui joue à la poupée.

Résultat : les filles intègrent rapidement dans leurs apprentissages la responsabilité affective et logistique du bien-être collectif. D’abord des poupées, puis les frères et sœurs, puis le couple et le foyer. C’est le cœur de la charge mentale : penser à la place des autres pour que tout roule — sans qu’on le leur demande, et souvent sans reconnaissance.

Ces attentes ne sont pas réparties également dans la population : elles pèsent plus lourdement sur les femmes, car elles sont construites comme les gardiennes du soin, du lien, de la paix domestique. La charge mentale repose ainsi sur une division “genrée” des responsabilités invisibles.

3 Un moteur du burnout parental (et c’est documenté)

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6% des parents en France souffrent d’un burnout parental, avec symptômes d’épuisement extrême, distanciation affective, perte de sens. Deux tiers de ces cas concernent les femmes. Il faut dire que les femmes sont poussées à être ultra-performantes, en mélangeant travail professionnel “double journée”  de planificatrice familiale. Les conséquences ? Des troubles cardiovasculaires, hormonaux,... chez de très nombreuses femmes, y compris dès la trentaine.

Le ministère de la Santé rappelle :

- 44 % des femmes ont souffert d’un trouble psychique au cours de leur vie (vs 36 % des hommes),

- 17 % ont connu une dépression post-partum,

- Entre 2013 et 2015, le suicide représentait 13,4 % des décès maternels en période périnatale.

Si vous avez besoin d’aide, appelez le numéro vert 3919.

4 Une charge mentale qui entretient les inégalités femmes-hommes

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Les femmes se chargent de 64 % du travail domestique et de 71 % des tâches parentales (INSEE 2010, citée par le CNRS). Près de la moitié (44 %) des mères de famille affirment avoir « souvent » l’impression de ne pas s’en sortir, pour seulement 31 % des pères de famille. Avec pour conséquences :

1. Temps et énergie limités

Cette gestion invisible et constante du foyer, des éventuels enfants et de la vie familiale réduit la disponibilité mentale et physique des femmes pour investir pleinement dans une carrière exigeante, un emploi qualifié ou des responsabilités managériales.

2. Réduction du temps de travail ou arrêt temporaire

Pour faire face à cette charge, de nombreuses femmes optent pour des temps partiels ou interrompent leur carrière. Cela entraîne une perte de compétences perçues ou réelles, un frein à l’évolution professionnelle, et donc une sous-représentation dans les postes à responsabilité ou à haute qualification.

3. Moindre disponibilité perçue par les employeurs

Les femmes supportant la charge mentale sont souvent vues comme moins disponibles ou moins mobiles. Cela peut générer une discrimination implicite à l’embauche ou à la promotion, car elles sont perçues comme moins « investies » ou « moins flexibles ».

4. Auto-censure et choix de carrière contraints

Sous l’effet de la charge mentale, certaines femmes intériorisent des limitations. Elles évitent les secteurs ou postes jugés incompatibles avec la vie familiale, ou font des choix de carrière plus « compatibles » avec leurs responsabilités domestiques. Souvent au détriment des emplois les plus qualifiés ou les plus influents.

5 Une spirale qui se nourrit elle-même

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Plus on porte la charge mentale, plus on devient « la personne qui sait ». Or, dans un couple ou une famille, celui ou celle qui sait finit par être la seule personne à pouvoir anticiper, organiser, vérifier. Cette compétence devient une prison : on ne délègue pas facilement ce qui n’est pas transmissible sans tout expliquer, et l’autre ne prend pas l’initiative… parce qu’il ne détient pas l’info.

Résultat : plus une femme gère, plus elle est perçue comme « la meilleure pour ça », et plus elle est sollicitée… ce qui renforce encore la charge mentale. C’est une boucle sans fin, souvent invisible aux yeux de celui qui ne la porte pas.

6 Une souffrance tue… car banalisée

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Contrairement à d'autres formes de surcharge (stress professionnel, burn-out au travail), la charge mentale n’est pas encore pleinement reconnue comme un problème légitime de santé mentale ou d’équilibre de vie. Elle est souvent réduite à de la mauvaise organisation ou de l'exagération.

Pourtant, de nombreuses femmes témoignent d’un sentiment d’épuisement, de solitude, voire de dévalorisation personnelle, lié à cette pression constante de tout prévoir pour tous. Le fait qu’elle soit invisible et normalisée aggrave ses effets psychologiques. La souffrance est réelle, mais elle est souvent niée – y compris par celles qui la vivent.

7 Une charge mentale qui survit aux séparations

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Même après un divorce ou une séparation, la charge mentale reste très majoritairement féminine. Les mères continuent souvent d’assumer la logistique des enfants, même lorsque la garde est partagée : fournitures scolaires, vêtements à la bonne taille, rendez-vous médicaux, suivi des devoirs, etc.

La charge mentale ne disparaît donc pas avec la séparation du couple : elle suit les femmes, preuve qu’il ne s’agit pas d’un « choix personnel » mais d’un système persistant.

8 Une construction sociale ... donc réversible

Par où commencer ? 

Premier pas : nommer sans honte, et reconnaître le fait qu'une autre organisation est possible. 

Deuxième pas : formaliser la charge mentale (« qui pense à ? », « qui anticipe ? »), puis ajuster ensemble.

La charge mentale n’est pas une lubie du XXIème siècle. C’est un travail invisible, reconnu scientifiquement, qui mine la santé, exacerbe les inégalités, et entame l’égalité réelle, sociale, professionnelle, personnelle.

Il faut en parler, écouter, reconfigurer en urgence, et donner la possibilité aux femmes de réinvestir de l’espace mental pour soi.

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