10 % les PLUS RICHES responsables de 2/3 du réchauffement climatique
Une étude publiée début mai révèle que les 10 % les plus riches du globe seraient responsables de la majorité des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Deux tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre sont générés par une minorité : les 10 % les plus riches de la planète. C’est ce que révèle une étude publiée en mai 2025 dans la revue Nature Climate Change.
Alors que le réchauffement s’accélère et que les catastrophes se multiplient, cette concentration extrême des responsabilités interroge les politiques climatiques actuelles. À l’échelle mondiale, les inégalités sociales se traduisent aussi par des inégalités environnementales profondes. Décryptage en 7 points.
| 1 | EMISSION CO2 : Une nouvelle étude choc parue en mai 2025 |
Le 7 mai 2025, la revue scientifique Nature Climate Change publiait une étude sans appel : les 10 % les plus riches émettent à eux seuls 66 % des gaz à effet de serre responsables du changement climatique depuis 1990. Cette analyse, dirigée par Sarah Schöngart, s’appuie sur des données économiques mondiales croisées avec des modélisations climatiques. Elle confirme une tendance connue mais rarement chiffrée avec autant de précision : les plus hauts revenus portent une part écrasante de la responsabilité dans le dérèglement climatique mondial.
On parle souvent des « 10 % les plus riches » sans toujours savoir de qui il s’agit. Selon le World Inequality Report 2022 (WIR), ce groupe correspond aux personnes gagnant au moins 125 000 dollars par an (soit environ 7 000 à 8 000 euros par mois, en parité de pouvoir d’achat et avant impôts). Cela inclut bien sûr les milliardaires, mais aussi une large part des classes aisées dans les pays développés.
| 2 | EMISSION CO2 : Les inégalités environnementales se creusent |
Ces résultats font écho aux alertes lancées dès 2022 par l’économiste Lucas Chancel, co-directeur du Laboratoire sur les inégalités mondiales. Selon le World Inequality Report, en 2019, les 10 % les plus riches émettaient déjà 48 % du CO₂ mondial, contre 12 % pour la moitié la plus pauvre de la population. Depuis, l’écart s’est accru. Les plus aisés polluent davantage, non seulement par leur consommation mais aussi par leurs investissements dans des secteurs très carbonés. Cette double contribution renforce des déséquilibres devenus structurels.
L’empreinte carbone ne vient pas seulement des transports. Le numérique — streaming, cloud, cryptomonnaies — génère des émissions comparables à celles de l’aviation. Selon l’AIE, les data centers et réseaux consomment environ 1 % de l’électricité mondiale, et leur impact grimpe encore avec le crypto-minage. Ces usages sont majoritairement le fait des foyers les plus aisés.
| 3 | EMISSION CO2 : L’impact des investissements financiers sur les émissions |
Les émissions liées aux hauts revenus ne proviennent pas seulement de leurs habitudes de consommation, mais aussi de leurs investissements dans des secteurs fortement émetteurs comme les énergies fossiles, l’industrie minière ou la production lourde.
Un rapport publié par Oxfam en octobre 2024 indique que les 50 personnes les plus fortunées au monde ont une empreinte carbone bien supérieure à la moyenne mondiale.
Par exemple, les émissions associées aux investissements et à la consommation d’Elon Musk équivaudraient à plusieurs siècles d’émissions d’une personne moyenne. En France, des estimations similaires concernent Bernard Arnault, notamment en lien avec ses actifs financiers.
Ces données montrent que pour mesurer avec justesse l’impact climatique des ultra-riches, il faut aller au-delà de la consommation personnelle.
De nombreux fonds « durables » continuent de financer des secteurs polluants comme le pétrole ou le gaz. Une enquête de 2024 révèle que 70 % des fonds passifs dits verts investissent dans les énergies fossiles d'après Reclaim Finance.
En 2025, des fonds européens labellisés « verts » détenaient encore plus de 33 milliards de dollars en actions fossiles selon The Guardian. Ces dérives relèvent du greenwashing et ont déjà conduit à plusieurs sanctions.
| 4 | EMISSION CO2 : Les plus pauvres paient l’addition climatique |
Les conséquences de ces émissions massives se font sentir ailleurs : principalement dans les régions les plus vulnérables, qui y ont pourtant peu contribué. L’étude publiée dans Nature Climate Change montre que les émissions des plus riches ont contribué à doubler, voire tripler, la fréquence des vagues de chaleur extrêmes en Afrique, en Asie et en Amérique latine.
Sécheresses prolongées en Amazonie, inondations en Asie du Sud, incendies en Afrique australe : ces événements sont aggravés par des modes de vie à forte empreinte carbone. Les populations locales, peu émettrices, subissent les conséquences d’un système qu’elles n’ont pas créé.
Bien qu’ils émettent très peu de gaz à effet de serre, les pays du Sud global subissent de plein fouet les effets du réchauffement : sécheresses, inondations, montée des eaux. Selon le groupe V20, qui regroupe 55 pays vulnérables, les pertes économiques liées au climat ont dépassé 500 milliards de dollars sur les deux dernières décennies et pourraient atteindre plusieurs centaines de milliards par an d’ici 2030 selon une étude de V20 publiée en 2024.
| 5 | EMISSION CO2 : États-Unis et Chine en tête des pollueurs fortunés |
Les chercheurs pointent une double concentration des émissions : sociale et géographique. Les 10 % les plus riches, majoritairement situés aux États-Unis et en Chine, sont responsables d’une part disproportionnée des rejets de CO₂. Leur empreinte carbone serait environ six fois supérieure à celle d’un citoyen moyen.
Ce déséquilibre s’explique par des choix politiques et économiques, mais aussi par un accès inégal aux ressources. Les modes de vie de ces groupes influencent l’ensemble des dynamiques climatiques, avec des répercussions jusque dans les régions les plus fragiles de la planète.
| 6 | EMISSION CO2 : Une question de justice climatique |
L’étude met en lumière un enjeu fondamental : la justice climatique. Si les appels à la sobriété s’adressent à tous, les émissions ne sont pas équitablement réparties. Les plus riches polluent beaucoup plus, tandis que les populations modestes contribuent peu au réchauffement.
Appliquer les mêmes règles à tous sans distinguer les responsabilités risque de masquer les véritables leviers d’action. Une transition écologique juste devra reconnaître ces écarts et répartir les efforts de manière proportionnée, sous peine d’aggraver les inégalités sociales existantes.
Depuis quelques années, ONG et juristes militent pour que les atteintes graves à l’environnement soient reconnues comme un crime d’écocide, au même titre que les crimes contre l’humanité. Cette idée gagne du terrain : plusieurs pays ont déjà intégré cette notion dans leur droit, tandis que les Nations unies étudient son inscription au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
| 7 | EMISSION CO2 : Taxer les riches pour freiner la catastrophe ? |
Face à cette concentration des émissions, plusieurs experts plaident pour des mesures fiscales ciblées. Carl-Friedrich Schleussner, directeur du groupe de recherche sur les impacts climatiques à l’Institut international d’analyse des systèmes appliqués (IIASA), appelle à instaurer des taxes progressives sur les investissements à forte intensité carbone.
Selon lui, ignorer le rôle des ultra-riches serait une erreur stratégique majeure : « Une action climatique qui ne prend pas en compte leurs responsabilités démesurées passe à côté d’un levier crucial pour limiter les dommages à venir. » Ces taxes pourraient également permettre de financer les politiques d’adaptation dans les zones les plus menacées par la crise climatique.

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