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Les nouveaux mots du Larousse 2022

Savoir Par Hervé Resse 04 juin 2021

Les nouveaux mots du Larousse 2022
Hachette
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Voilà qui ne rajeunit personne : le PLI (Petit Larousse Illustré) sort sa 170ème édition… Avec son inévitable moisson de nouveaux mots, de nouveaux sens. La langue bouge, la langue vit !

Le dictionnaire Petit Larousse Illustré 2022 est un dictionnaire de langue. Et de langue singulièrement vivante. Chaque année ses rédacteurs lexicographes se donnent mission de noter et conserver les évolutions de la langue française. Et cela invite d’abord à rendre compte des nouveaux mots et expressions entrés dans notre quotidien. Le néologisme d’aujourd’hui, demain deviendra mot courant. L’entrée dans le dictionnaire consacre ces usages.

Sous l’influence de l’actualité – et nul ne viendrait contester ses impacts depuis mars 2020- , des sens inédits viennent aussi s’agréger à des mots préexistants.

Les jeunes générations notamment, inventent ou renouvellent, déconcertant parfois les boomers. Larousse tente tout de même de se préserver des effets de mode par trop éphémères, en quoi il se différencierait un peu, dit-on, de son concurrent bien connu.

Les emprunts à d’autres langues sont aussi nombreux. Là encore il arrive que certains s’en désolent : ah les craintes que suscite l’anglomanie langagière ! On nous assure que l’usage en français tient bon.

Le Larousse nous rappelle aussi que le Français s’enrichit des diversités régionales et internationales. Les histoires et cultures venues de la francophonie nourrissent notre langue.

Notre langue se renouvelle et vit.

1 Larousse 2022 : Les nouveaux mots nés de la pandémie

Les nouveaux mots du Larousse 2022
pixabay

Dans un précédent article un peu narquois, nous évoquions récemment ces expressions liées au COVID-19 (ou à LA COVID-19, comme vous voulez…) que nous aimerions bien oublier un peu, autant que les masques sur nos narines.

Plus sérieusement, cette damnée pandémie a fait jaillir de nouveaux mots appelés à durer probablement, même quand nous aurons terrassé le virus et ses variants.

Bernard Cerquiglini, linguiste, conseiller scientifique du Petit Larousse illustré et présentateur sur TV5 de l’émission Merci professeur ! rappelle que « la langue fait preuve de sa capacité néologique : l’épidémie requiert des mots nouveaux, on les crée ».

Le mot « Corona » n’a rien à voir avec une bière bien connue. Il vient du latin couronne : les virus corona ont la forme d’une couronne. À partir de ce corona s’est créé un préfixe, des plus créatif. Citons notre expert des mots nouveaux, qui amusé, commente : « confiné, on lisait pour ne pas devenir coronidiot, on travaillait ses coronabdos, avant de prendre un coronapéro avec ses coronamis. Ces mots précise-t-il ne sont pas encore entrés dans le cénacle laroussien. Mais existent bien les corona bonds qui sont des emprunts européens. Et assez inattendu, coronapiste ouverte en ville aux cyclistes. Ces mots figurent donc au PLI 2022.

Du virus diffusé dans l’air (aéroporté), on a appris qu’il était aussi transmis par la main, et donc désormais : manuporté. L’isolement ramené à deux semaines, a suscité quatorzaine, dérivé de quarantaine, en attendant septaine, déjà utilisé mais pas encore consacré. À partir du préfixe télé-, se sont imposés téléconsultation, ou télétravailler, naguère encore peu usité, mais désormais banal, comme le sont télétravail ou télétravailleur.

Peu sympathique, est apparu au plus fort de la tourmente le mot dépositoire, désignant le local situé hors de l’enceinte du cimetière et permettant le dépôt des cercueils en attente d’inhumation ou de crémation.

A partir du préfixe « dé », qui exprime soit la cessation, soit un état inverse ou contraire, se sont imposés déconfinementet déconfiner (mais aussi sous forme pronominale : se déconfiner), le nom n’existait jusque-là que pour un usage limité à la sûreté nucléaire. Notons d’ailleurs que les correcteurs orthographiques de nos traitements de texte les soulignent encore du rouge de l’impropre. Et comment est apparu reconfinement, l’expert nous annonce de possibles déclinaisons, comme redéconfinement, que suivrait ensuite, pourquoi pas, le plausible se redéconfiner.

« Dé », toujours, mais loin du COVID, est validé Déjudiciarisation : le fait, pour la loi, de privilégier le dialogue entre les deux parties dans certains litiges (divorce, par ex.), plutôt que de recourir à la justice. La déjudiciarisation s’inscrit dans une volonté de désengorger les tribunaux et d’accélérer le règlement des litiges.

2 Larousse 2022 : Les nouveaux usages pour des mots existants

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Des mots déjà présents mais peu utilisés puisque relevant d’un vocabulaire technique voire savant, ont désormais accédé à une notoriété grand public. Le dictionnaire se doit alors d’en valider les mérites. Ainsi asymptomatique, comorbidité, confinement, coronavirus, hydroalcoolique, incubateur, intubation, pandémie, respirateur, etc., qui figuraient déjà dans le Dico, voient leurs nouveaux sens précisés, puisque dorénavant courants. D’autres qu’on avait oubliés, s’offrent une seconde jeunesse : écouvillon, quarantaine, voire Plexiglas.

Pour certains de ces mots, le sens lui-même a évolué : l’adjectif asymptomatique qualifiait une maladie. Il se dit désormais d’une personne. Le virus peut être aéroporté, seules des troupes de soldats jusqu’ici l’étaient. Le confinement n’est plus seulement une précaution en matière de centrale nucléaire ; devenant « sanitaire » il décrit la conduite imposée à une population pour être protégée.

L’usage du masque a aussi fait évoluer le sens du verbe : comme le note avec malice Bernard Cerquiglini, quand le gouvernement invite le peuple à se masquer, il ne le convie pas au carnaval.

3 Larousse 2022 : Les nouvelles locutions

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L’apparition d’un sens nouveau fait aussi évoluer les locutions (groupes de mots figé ou stable ayant la même fonction qu'un mot). Ainsi la nouvelle édition du PLI valide-t-elle continuité pédagogique, porteur sain, déplacement dérogatoire, distanciation physique. On connait désormais l’essai randomisé (venu de l’anglais random, aléatoire). Des « foyer », « pic » ou « plateau » peuvent être épidémiques. Il est désormais des états d’urgence sanitaires. Un couvre-feu peut l’être également, et c’est nouveau.

L’immunité collective, de groupe ou grégaire, désigne le seuil à partir duquel la propagation d’un agent infectieux contagieux (bactérie ou virus, par ex.) est enrayée en raison d’une proportion suffisante de personnes immunisées (par infection naturelle, par vaccination, etc.) dans une population donnée. Ce seuil est très variable selon la maladie (de 50 % de la population pour la grippe à environ 90 % pour la rougeole). Cela méritait bien un paragraphe !

Sans oublier naturellement, l’incontournable geste barrière devenu star des infos des conférences de presse ministérielles, des solennelles prises de parole présidentielles…

4 Larousse 2022 : Pas de raz-de-marée des anglicismes

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Toujours sur le terrain de la pandémie, nous avons noté randomisé, venu de random signifiant « aléatoire ».  Le mot COVID est lui-même un acronyme anglais signifiant coronavirus disease, soit « maladie du coronavirus ». Cela explique qu’on n’ait pas au départ su s’il fallait dire LA Covid, puisque le « d » de disease devrait imposer « LA » maladie. Car les premiers usages avaient imposé « LE ». Dans le doute, le Larousse valide les deux usages, et laissera le temps décider.

Mais pour d’autres mots qui semblaient annoncer un nouveau déferlement d’anglicismes (rappelons-nous la manie des « ing », que nous avions pointée), il semble que le français ait su résister.

Cluster infectieux devient foyer de contagion. Tracking recule face au traçage, qui rejoint traçable et traçabilité. Notons que distanciation sociale, calque imprécis de social distancing s’efface devant distanciation physique. Épousant cette tendance, le Petit Larousse 2022 observe que cliqué-retiré vaut bien click and collect.

Infodivertissement, éventuellement péjoratif, désigne un type d’émission (de télévision, de radio) mélangeant en proportions variables ces deux ingrédients. Il a ainsi vaincu « infotainment » (tiré de l’anglais entertainment signifiant comme on le devine « divertissement »).

Reste que l’anglais tend à s’imposer dès qu’il s’approche des problématiques sociétales partagées dans ce monde globalisé. Cela vaut pour la finance, pour les technologies, pour le numérique notamment. Et cela passe souvent par l’utilisation d’acronymes, véritable passion anglo-américaine, comme on le verra plus bas.

Ainsi game designer, concepteur de jeux, spécialement de jeux vidéo, a désormais droit de cité en Français. Connaissez-vous désistance ? Ce nom féminin est directement tiré de l’anglais « desistance », avec juste ajout d’un accent sur le « e », naturellement. Ce mot désigne le processus par lequel l’auteur d’une infraction sort de la délinquance ou de la criminalité. C’est en somme l’opposé du mot récidive. Ce processus peut être accompagné par l’administration pénitentiaire.

Plus connu sans doute, ou destiné à le devenir dans le langage publicitaire, le cashback, est intronisé comme la « technique commerciale qui consiste à rembourser au consommateur une petite partie du montant de ses achats, directement sur son compte bancaire ».

Sont aussi à l’honneur krump qui désigne un style de danse urbaine issu du hip-hop, né dans les ghettos de Los Angeles. Après avoir dansé, savourez donc un mocktail. Tiré de mock, imitation, et cocktail, il désigne un cocktail sans alcool.

5 Larousse 2022 : Les sigles et acronymes

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Souhaitez-vous qu’on rappelle la différence entre un acronyme et un sigle ? Dans le premier cas, l’acronyme, les initiales ou premières lettres de mots forment un mot prononcé comme tel (Ex : SIDA, OVNI, UNESCO, URSSAF,) ; dans l’autre les initiales sont prononcées une à une (SNCF, RFI, RTL, RATP).Évidemment, COVID est un acronyme, pour « COrona VIrus Disease ». On entend aussi « SARS »- CoV-2. SARS est ici l’acronyme anglais de « Severe Acute Respiratory Syndrome », soit « coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère ». Il décrit donc le coronavirus découvert en Chine fin 2019, responsable de la maladie infectieuse très contagieuse (COVID-19), à l’origine de la pandémie mondiale. (On trouve parfois la graphie francisée SRAS-CoV-2.)

Loin de la pandémie, on voit aussi au Larousse PISA, acronyme de l’anglais « Program for International Student Assessment », in french : programme international pour le suivi des acquis des élèves. Cet acronyme décrit l’ensemble d’études menées tous les trois ans par l’OCDE auprès d’élèves de 15 ans dans les pays membres ainsi que dans de nombreux pays partenaires, visant à comparer, via un classement, les performances de leur système éducatif respectif.

Du côté des sigles, saluons l’entrée de la RSE (sigle de « Responsabilité Sociale [ou sociétale] de l’Entreprise »), déjà bien connu des communicants et étudiants visant à le devenir. On désigne par là l’ensemble des pratiques qu’adoptent les entreprises désireuses d’intégrer les préoccupations sociales, environnementales et éthiques dans leurs activités et leur stratégie.

Et n’oublions pas VPN (sigle hérité de l’anglais « Virtual Private Network », soit réseau privé virtuel). Il entre pour désigner un réseau privé qui assure l’anonymat, la confidentialité et la sécurité des informations échangées en ligne, par leur circulation chiffrée à l’intérieur d’un réseau public (Internet, notamment). VPN a probablement dû sa validation à ses usages démultipliés à l’occasion du télétravail.

6 Larousse 2022 : Les mot des régions et de la francophonie

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Il y a différentes façons d’évaluer le nombre de pays utilisant la langue française, et combien d’humains la pratiquent. Wikipédia nous en dit plus ici.

Reste que la langue évolue différemment selon les territoires. La francophonie est diverse, et riche. On peut saluer la légendaire créativité de nos chers cousins Québécois, toujours attentifs à trouver de belles alternatives à l’anglomanie. Faut-il encore rappeler le réjouissant divulgâcher tenant tête à « spoiling » ? Ils proposent désormais un nouveau sens au mot vigile, pour désigner un rassemblement de personnes après un événement tragique (avec ou sans marche blanche à la clé).

De façon plus joyeuse, ils suggèrent aussi des nounouneries, bêtises ou stupidités, par exemple exprimées à l’occasion d’un bien-cuit, discours humoristique prononcé à l’intention d’un invité d’honneur, lors d’une réception, mêlant habilement compliments et moqueries afin d’amuser l’assistance.

Ces deux dernières années ont été peu propices aux joies de la fête. Mais les beaux jours reviendront, offrant de nouvelles occasions de s’enjailler. Le mot vient de Côte d’Ivoire et gagne en popularité dans les jeunes générations. C’est s’amuser, faire la fête, où s‘entend aussi l’anglais « enjoy ».

On pourra alors sacrifier aux plaisirs du Berlot, de la Gerbaude et de la Godaille, voire pourquoi pas du Messti. Autant de mots issus de nos parlers régionaux pour désigner des réjouissances collectives. Berlot vient du Centre. Godaille de Champagnes-Ardennes, évoque une fête bien arrosée. Gerbaude s’entend dans les régions Centre et Aquitaine, pour parler des fêtes des fins de moissons (venant sans doute du mot Gerbe). Quant au Messti, né de l’allemand Messtag signifiant « jour de messe », on l’utilise en Alsace pour évoquer une fête patronale ou kermesse.

Et en cas d’excès, faites donc appel à un Tisaneur ! Ce guérisseur qui prépare des tisanes à base de plantes connues pour leurs vertus médicinales, à la Réunion.

7 Larousse 2022 : En route vers un monde d’Après ?

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On le voit, notre langue, elle, n’a pas été confinée durant la dernière période. Tout cela débouchera-t-il sur un monde d’après, société nouvelle que les gens espèrent bâtir à la suite de la crise majeure due à la pandémie de COVID-19, en tirant les leçons du passé de manière à mettre fin aux dysfonctionnements du monde d’avant… On peut en débattre, mais le Larousse en tout cas retient l’idée contenue dans la locution.

Et pour en deviner quelques contours, on peut noter l’émergence d’autres mots de nos temps présents…

Cyberstratégie ? désigne la stratégie développée par un État, un groupe, un individu, pour renforcer son contrôle et sa puissance dans le cyberespace, perçu à la fois comme enjeu, théâtre et instrument des rivalités contemporaines. Elle couvre une multitude de champs (technologique, géopolitique, économique, juridique, militaire...).

Inclusif ne désigne pas seulement l’écriture du même nom, sujet à maintes polémiques ou diatribes. Le mot peut aussi s’associer à croissance, pour désigner une croissance économique profitant à tous les groupes sociaux, et permettant de réduire tous types d’inégalités (sociales, territoriales, éducatives, professionnelles, etc.) au sein d’un pays ou d’un ensemble de pays.  La mesure de la croissance inclusive s’étend sur un large spectre d’indicateurs, qui reflètent son caractère multidimensionnel.

Elle pourrait s’appliquer pourquoi pas aux cités-États, comprises comme entité politique dont le territoire correspond globalement à celui d’une grande ville, qui possède généralement l’ensemble des pouvoirs et des caractéristiques d’un État souverain (ex. : Hongkong, Singapour, Vatican).  Apparue en Mésopotamie au IIIe millénaire av. J.-C., la cité-État a désigné une organisation politique spécifique qui a varié selon les époques et les régions.

On y débattrait aussi de sous-représentation et surreprésentation de catégories de personnes moins ou plus nombreuse en proportion dans un ensemble donné que dans la population de référence.  Femmes et Hommes, par exemple ? Par exemple !

Cela vaudrait aussi pour les racisés, autre mot ouvrant à contestations tant sur la vision du monde qui en sous-tendrait - ou non l’usage-, que sur l’étendue même de qui serait concerné. Sans refermer le débat, Larousse propose que le mot désigne sobrement quelqu’un « qui est l’objet de perceptions ou de comportements racistes ».

Dans la large sphère sociétale, d’autres mots tels GOUVERNANCE, HARCÈLEMENT, JUNGLE, ÉMOJI, NÉOBANQUE, VIDÉOVERBALISATION, CONSOMMACTEUR (ou TRICE) CRYOSPHÈRE, DÉCARBONATION (ou DÉCARBONISATION), sont également validés. Et signalons enfin que PLASTICROÛTE n’est pas une nouvelle spécialité gastronomique, mais une croûte de matière hybride, minérale et plastique, formée par l’incrustation de petits débris de plastique (polyéthylène, principalement) à la surface des rochers du littoral.  Nouvelle forme de pollution marine, la plasticroûtea été observée pour la première fois sur l’île de Madère, en 2016.

Le Monde d’Après n’ira donc pas sans nouveaux soucis !

8 Larousse 2022 : Demandez le programme

Saluons donc ce nouvel apport à la culture signé des héritiers du bon Pierre Larousse, né dans la charmante petite ville bourguignonne de Toucy (Yonne).

Pour cette 170ème édition, l’ouvrage comprend plus de 63800 mots, précise 125 000 sens, auxquels s’ajoutent 20.000 locutions.  Attentif à la diversité de « la langue de Molière », comme on dit toujours, il y ajoute 2000 régionalismes et mots de la francophonie.

Ajoutons-y 28. 000 noms propres, (lieux, personnalités, ou événements ! Nous verrons bientôt quelques personnalités qui sont depuis cette année invités à cette grande table…

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