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7 raisons de s'inquiéter de l’expansionnisme de la Chine

Décrypter Par Laurent Gayard 22 juin 2020

7 raisons de s'inquiéter de l’expansionnisme de la Chine
pixabay
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L’épidémie de Coronavirus a exacerbé les tensions, déjà importantes, entre les Etats-Unis et la Chine qui affirme de plus en plus clairement, voire agressivement, ses ambitions de puissance globale. Mais
la Chine a-t-elle les moyens de ses ambitions ?

A l’occasion du 19ème congrès du Parti Communiste Chinois, en 2017, le président de la République Populaire de Chine Xi Xinping, avait repris à son compte la déclaration faite par Mao en 1949, qui souhaitait voir la Chine s’affirmer cent ans plus tard, en 2049, comme la première puissance mondiale. Le gouvernement chinois n’aura peut-être pas besoin d’attendre jusque-là. Xi Xinping a clairement laissé entendre que la Chine se trouvait dès aujourd’hui en face d’une opportunité historique. Mais les atouts chinois sont-ils suffisants pour lui permettre de faire fi des contraintes qui s’imposent encore à elle et de faire face à la défiance grandissante de la communauté internationale ? Réponse en 7 questions.

1 La Chine : Est-elle toujours une dictature ?

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Congrès National du Peuple à Pékin

wikipedia / Thomas.fanghaenel

C'est sa constitution elle-même qui le proclame. « La République populaire de Chine est un État socialiste de dictature du prolétariat, dirigé par la classe ouvrière et basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans. » La Chine de Mao a calqué son modèle politique sur celui de la défunte URSS avec la première constitution adaptée en 1954, instaurant la domination absolue du Parti Communiste Chinois sur le système politique. La constitution a été amendée un certain nombre de fois, notamment par Deng Xiaoping à partir de 1978, qui a mis en avant la notion de « démocratie délibérative » au sein des institutions, après la période du « règne d'un seul », instaurée par Mao.

Néanmoins, s'il existe un parlement national, le Congrès National du Peuple, le plus grand au monde avec près de 3 000 membres, c'est le Comité Central du Politburo et ses 7 membres qui dirigent le pays, avec bien sûr à sa tête le président de la République Populaire de Chine, Xi Xinping, dont le pouvoir est presque incontesté.

2 La Chine : Quel pouvoir a réellement Xi Xinping ?

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Xi Xinping

WIKIPEDIA commons

La lutte pour le pouvoir en Chine s'accomplit derrière des portes closes. Pour l'étranger, les institutions doivent renvoyer une image de stabilité et d'harmonie. Cette vitrine idéale s'est fissurée en 2012, lors de l'immense scandale qui a accompagné la chute de Bo Xilai, étoile montante du parti communiste et principal rival de l'actuel président Xi Xinping. Alors que son principal lieutenant se réfugiait dans un consulat américain encerclé par la police chinoise, Bo Xilai a quant à lui été arrêté et emprisonné et Xi Xinping a pu accéder au pouvoir.

L'affaire a révélé l'influence des factions politiques qui régissent secrètement la vie politique chinoise. En 2017, à l'occasion du 19ème Congrès du Parti Communiste, Xi Xinping a obtenu une triomphale réélection à la tête de la République Populaire de Chine et s'est assuré de ne conserver, au sein du Comité Central du Politburo, que des alliés.

La « pensée Xi Xinping » a été inscrite dans la charte fondatrice du parti communiste chinois, au même titre que la « pensée Mao Zedong ». En mars 2018, Xi Xinping a fait lever à la fois la limitation à deux mandats présidentiels et la limitation d'âge qui forçait auparavant un dirigeant chinois à quitter le pouvoir passé 67 ans, l'âge atteint par Xi Xinping en 2020.

3 La Chine : Quel poids a le Parti Communiste dans la société chinoise ?

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Parti Communiste Chinois

Wikipedia

Le Parti Communiste Chinois (PPC) a été fondé dans la concession française de Shanghai en 1921. Il comptait à l'époque une cinquantaine de membres, il en dénombre aujourd'hui plus de 90 millions, ce qui reste encore modeste pour un pays peuplé d'un milliard trois cent soixante dix neuf millions d'habitants au dernier recensement de 2017.

Le PCC n'est pas le seul parti existant en Chine. Huit autres partis représentent aussi bien l’opposition intellectuelle contrôlée par le pouvoir que les intérêts de catégories bien précises de la population, comme par exemple l' « Association pour la construction démocratique de Chine », dont les membres sont des entrepreneurs du secteur de la fabrication, de la finance, ou des industries commerciales dans les secteurs privés et publics. Ces partis doivent cependant soumettre leur activité à l'examen sourcilleux du Comité central pour l'inspection disciplinaire du Parti communiste chinois.

Le PCC est donc la seule véritable force politique du pays et reste le tremplin social le plus important au niveau local, provincial ou national. Depuis les années 2000, sous l'impulsion du président Jiang Zemin, les cadres et directeurs d'entreprises publiques et privées peuvent siéger dans ses instances, en accord avec les principes de « l'économie socialiste de marché », ce qui permet au pouvoir politique de maintenir également un contrôle efficace sur le secteur privé en pleine expansion.

4 La Chine : Est-elle la première économie mondiale ?

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Hong-Kong

Pixabay

En 2014, la Banque Mondiale a confirmé que le Produit Intérieur Brut en Parité de Pouvoir d’Achat (PIB/PPA)[1] de la Chine a dépassé celui des Etats-Unis. En 2017, le PIB PPA chinois se montait à près de 22 000 milliards de dollars contre un peu plus de 19 000 milliards de dollars pour les Etats-Unis.

En termes de PIB brut cependant, la Chine reste derrière les Etats-Unis. D’autre part, la Chine est une économie manufacturière et exportatrice qui dépend largement des marchés occidentaux sur lesquels s’écoulent ses produits. Le fait que les pays occidentaux achètent plus qu’ils ne vendent dans le monde garantit aussi leur domination monétaire. La domination du dollar est toujours écrasante à l'heure actuelle : 63,5 % des réserves en devises des banques centrales mondiales restent constituées en dollars contre 20 % pour l'euro, 4,52 % pour le yen ou 1,1 % pour le yuan[2].

Enfin, l’économie chinoise est confrontée à de lourdes menaces qui pèsent sur sa croissance : la crise du Covid-19 bien sûr, qui a déjà entraîné une contraction de 6,8 % de son PIB au premier trimestre 2020 et la mise au chômage de plus de 200 millions de travailleurs chinois.

La dégradation des relations économiques et diplomatiques avec les Etats-Unis pousse aussi les entreprises chinoises à rapatrier leurs avoirs, de crainte qu’ils ne soient exposés à des mesures de rétorsion américaine. On a vu ainsi les BATX[3], ainsi qu’un grand nombre d’entreprises de moindre taille se replier aujourd’hui vers la bourse de Hong Kong, à l’image d’Alibaba en novembre 2019 ou de JD.com, autre géant du commerce en ligne, en juin 2020. Au-delà des effets immédiats de la crise du coronavirus, la Chine est confrontée au vieillissement accéléré de sa population, comptant aujourd’hui 200 millions de plus de 65 ans, un chiffre et une facture sociale appelés à doubler d’ici à 2050. Enfin, les dépenses militaires engagées par la Chine pèsent également lourd sur son économie, dans un environnement géopolitique très hostile. 

[1] Au lieu de calculer la simple production de richesse cumulée au cours d’une année, comme le PIB, le PIB-PPA considère la valeur d’un « panier » de quelques milliers de produits pour calculer la valeur à taux de change égal du PIB d’un pays.

[2] Chiffre 2018. FMI/Natixis

[3] Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi

5 La Chine : Est-elle la première puissance militaire mondiale ?

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Soldat chinois

pixabay

Avec plus de 2 millions de soldats d’active et plus de 3 millions de réservistes, la Chine possède actuellement la plus grande armée du monde. Le nombre d’armes nucléaires en possession de la Chine est très diversement apprécié par les experts mondiaux et les estimations oscillent entre 300 (l’équivalent de l’arsenal français) et 1 000 têtes nucléaires.

Le budget de la défense chinois est le 2ème du monde, encore loin derrière celui des Etats-Unis, et la Chine accuse encore un certain retard technologique vis-à-vis de ses rivaux occidentaux, russes ou japonais, retard comblé à grande vitesse par l’entreprise de modernisation lancée par Xi Xinping à son arrivée au pouvoir en 2013.

Le principal handicap de la Chine reste cependant son environnement géopolitique, très hostile. L’immense pays, dont la superficie équivaut à celle de l’Europe partage des frontières avec quinze autres nations, qui représentent toutes une menace potentielle et Pékin entretient des différents territoriaux avec tous ses voisins de la mer de Chine. Si les capacités militaires de la Chine ont largement progressé, ces progrès sont contrebalancés par la course aux armements qui, en Asie et dans le Pacifique, a amené le Japon, la Corée du sud, le Vietnam, les Philippines, l’Australie, l’Inde ou encore l’Indonésie à renforcer leurs capacités militaires pour faire face aux prétentions chinoises.

Les récents accrochages avec l’armée indienne dans l’Himalaya illustrent à nouveau la persistance de ces tensions. Les Etats-Unis disposent en cela d’un large avantage sur l’Empire du Milieu. On voit mal dans un avenir proche le Canada ou le Mexique leur déclarer la guerre. La Chine, elle, n’a en Asie que des alliés de circonstance et des adversaires potentiels.

6 La Chine : Est-elle sur le chemin de la puissance globale ?

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Puissance traditionnellement continentale, la Chine s’est engagée, depuis l’arrivée au pouvoir de Deng Xiaoping en 1976, dans une politique d’ouverture, confirmée à la fin des années 90 par le mot d’ordre du président Jiang Zemin : « Zǒu Chū Qù », « Sortir de Chine ». Ce mot d’ordre s’est traduit par une stratégie d’expansion économique, puis territoriale, avec le lancement du vaste projet des nouvelles routes de la soie par Xi Xinping en 2013, et la construction de la « Grande Muraille de Sable », vaste réseau d’îlots artificiels et de bases militaires en mer de Chine.

En finançant la rénovation ou la construction de ports civils ou militaires sur le pourtour de l’océan indien, comme Gwadar au Pakistan, financé avec des fonds chinois, Pékin étend son influence jusqu’au continent africain, à la fois économiquement et militairement. En 2017, le gouvernement chinois a inauguré une nouvelle base militaire à Djibouti, voisinant avec les bases américaines et françaises installées depuis des années dans ce petit Etat-garnison, et Pékin a déjà en projet la construction d’une seconde base militaire en Namibie, à Walvis Bay.

Parallèlement, l’influence chinoise se renforce en Asie centrale, traditionnelle zone d’influence russe, à mesure que les routes de la soie chinoise progressent, à coups d’investissements pharaoniques dans les infrastructures pétrolières, ferroviaires ou routières. Cette stratégie d’expansion irrite bien sûr ses rivaux mondiaux ou régionaux, Etats-Unis, Inde ou Japon au premier chef, et inquiète même son allié russe.

7 La Chine : Une guerre avec les Etats-Unis peut-elle éclater ?

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C’est exactement la question que posait en 2016 une très sérieuse étude commandée par le Pentagone à la RAND Corporation, l’un des think tank les plus écoutés à Washington. La conclusion de l’étude se révélait inquiétante pour chacun des deux pays : oui, une guerre peut éclater entre Etats-Unis et Chine, plus vraisemblablement sous la forme d’un conflit maritime localisé en Asie et non, il est impossible de prédire avec assurance qui sortirait vainqueur d’un tel conflit. En conclusion de l’enquête de 116 pages, les auteurs appelaient les leaders des deux puissances à la prudence, en raison du coût exorbitant que représenterait un affrontement militaire, même de faible envergure, dans une région où transitent 40 % du commerce maritime international.

Cet appel à la prudence est d’ailleurs relayé par des experts chinois, à l’instar de Qiao Liang, général en retraite de l’Armée de l’air chinoise, essayiste et expert militaire de premier plan qui, dans une interview accordée récemment à la revue hong-kongaise Bauhinia, déconseillait à Pékin de mener une politique aventuriste… en tentant par exemple d’envahir Taïwan : « Nous ne pouvons pas laisser notre génération commettre le péché d'interrompre le processus de renaissance de la nation chinoise. »

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