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Les masques chirurgicaux, qui bénéficie du boom des ventes ?

Décrypter Par Valentin Fautaigne-Mantes 27 avril 2024

Les masques chirurgicaux, qui bénéficie du boom des ventes ?
pixabay
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Face à l’avalanche de chiffres relatifs à la vente des masques, il est logique de s’interroger sur l’identité de ceux qui profitent réellement du boom de ce produit. Qui sont les véritables bénéficiaires de la crise sanitaire ? À qui profite réellement la vente des masques chirurgicaux ?

Répondre à ces questions, c’est évaluer le rôle de chaque intervenant de la chaîne de riposte contre la pandémie.

1 Les dépenses liées au port du masque

Nous l'avons tous ressenti, depuis le début de la Covid-19, nos portefeuilles se sont allégés. Malheureusement, cet allègement ne fut pas de notre volonté. Les masques, accessoires désormais obligatoires et indispensables, ont creusé un trou dans les finances de tout un chacun.

Le journal Le Parisien a réalisé un calcul qui permet d’avoir une meilleure idée de la situation. D'après ce dernier, chaque famille de quatre personnes dépenserait en moyenne 228 euros pour l’achat des masques jetables, chaque mois. Si le choix est plutôt porté sur les masques en tissu lavables et réutilisables, cette même famille déboursera la somme de 96 euros.

Dans le cas d’une personne seule utilisant en moyenne deux masques par jour, selon les recommandations des autorités sanitaires, la somme à dépenser chaque mois se chiffre à 57 euros. Une telle dépense est destinée à l’achat d’une soixantaine de masques chirurgicaux. Selon un arrêté du gouvernement dont la validité s’étend jusqu’au 10 janvier 2021, aucun masque ne doit coûter plus de 95 centimes d’euros.

Alain Bazin est le président de l’association UFC-Que Choisir. Dans un entretien accordé à nos confrères de France Info, celui-ci déclare : « Aujourd’hui, on compte dans les 100 euros par mois pour une famille avec deux enfants pour les masques jetables. Ça peut aller, dit-il, jusqu’à 200 euros pour des masques réutilisables en tissu. Donc, c’est un budget, bien sûr, qui n’est pas du tout négligeable. »

2 De la nécessité de sauver des vies à l’appât du gain

Nous nous souvenons tous des abus commis par certains pharmaciens et professionnels de la santé qui eurent lieu au début de la pandémie. Entre les pharmaciens qui multipliaient par 7 les prix, en passant par le marché noir des masques s'étant crée dans les premiers jours de la crise. L'appât du gain fut extrême pour certains.

D'après les informations fournies par le site techopital.com. En 2020, les dépenses relatives à l’achat des masques en France s’élèvent à 2,5 milliards d’euros pour un total de 3,4 milliards de masques achetés cette même année. Pour mieux comprendre cette commande, elle correspond à 2,4 milliards de masques chirurgicaux et 978 millions de masques FFP2. La période allant du 30 janvier au 19 mai 2020 est celle pendant laquelle ces commandes ont été passées.

Les ventes de masques sont restées à un niveau très élevé en France, malgré le plafonnement du prix de vente. Une opportunité dans laquelle n’ont pas hésité à s’engouffrer tous les investisseurs qui étaient à la recherche d’un business lucratif et très rentable. Les chiffres annoncés par l’agence Nielsen sont assez éloquents sur le sujet. Il n’a en effet fallu que trois semaines pour que la filière enregistre le chiffre record de 94 millions d’euros de bénéfices.

La date de référence prise par le cabinet LB Conso pour effectuer cette analyse est celle du 4 mai 2020. Elle correspond à l’entrée en scène des masques dans le circuit de la grande distribution. À elle seule, la première semaine a généré un bénéfice estimé à 32 millions d’euros. Le détail des bénéfices sur les trois semaines se présente comme suit : 32 millions d’euros la première semaine, 36 millions la deuxième et 26 millions la troisième semaine.

N'oublions pas non plus que l'appât du gain, fut également dû aux fournisseurs. En effet, on se souviendra des scandales des stocks de masques rachetés pour jusqu'à 3 fois leur prix sur le tarmac des aéroports.

La grande distribution n'est pas en reste non plus. Le Figaro publia une analyse approfondie des ventes du secteur, qui sont éloquentes vis-à-vis de la situation. Selon la même analyse, 57 % de masques ont été vendus dans des supermarchés, soit 37 % des ventes réalisées dans le domaine de la grande consommation.

3 La vente des masques explose dans la grande distribution

En dix semaines, les bénéfices engrangés par le secteur de la grande distribution sur la vente des masques sont énormes. On parle d’un chiffre d’affaires estimé à 175 millions d’euros. Ces informations sont fournies par l’agence Nielsen, une société d’analyse des données. Selon cette agence, la vente des masques a connu en 2020 un taux de croissance de l’ordre de 14 % par rapport à l’ensemble des produits de grande consommation.

Leur présence désormais permanente dans les grandes surfaces a permis de pallier à la rareté du produit constaté au début de la pandémie. L’autorisation de vendre des masques dans les grandes surfaces date du 4 mai 2020. Deux catégories de masques sont disponibles dans ces enseignes. Il s’agit d’une part, des masques réutilisables en tissu et d’autre part, des masques jetables à usage unique encore appelés masques chirurgicaux.

Selon des sources médiatiques, les masques auraient généré de très gros bénéfices aux distributeurs. Un argumentaire balayé d’un revers de main par les dirigeants des grandes enseignes. Pour ces responsables les masques sont tout simplement un produit d’appel dont le rôle consiste à faire venir plus de clients dans les magasins. Selon eux, les boîtes de masques ne génèrent pas de bénéfices comme on pourrait le croire.

Christopher Dejob est le directeur d’une grande surface. Selon lui, « Ces boîtes de masques sont vendues au prix coûtant. Il est hors de question que l’on inflige un prix plus important, notre but, en tant que commerçant, c’est aussi d’accompagner nos clients, nous ne prenons aucun bénéfice sur les masques » conclut-il. Cependant, difficile de croire à cette ritournelle quand on sait que personne n’investit pour perdre de l’argent.

4 Biotechs et fabricants de masques, les vrais bénéficiaires de la crise sanitaire

S’il est désormais établi que la grande distribution a engrangé d’énormes bénéfices sur la vente des masques, que dire des fabricants eux-mêmes ? À tout prendre, ce sont eux les véritables bénéficiaires de la crise sanitaire qui a secoué le monde cette année. La construction, en 11 jours par Guan Xunze, d’une usine destinée à produire des masques N95 l'illustre.

L’explosion du nombre de contaminations en Europe a fait croître le nombre de fabricants de masques en Chine. Aujourd’hui, l’on dénombre, pas moins de 8950 entreprises spécialisées dans la production des masques sur le territoire chinois. Ce chiffre est fourni par Tianyan Cha, un site d’informations fournissant des données sur les entreprises chinoises.

De plus, de nombreuses entreprises européennes ont fait évoluer leur outil de production afin de pouvoir bénéficier de la manne financière que représentent tant les masques de tous types tels que les masques chirurgicaux ou N95 auxquels s'ajoutent le gel hydroalcoolique ou bien encore les visières anti-projections. On se souvient que nombre de groupes du luxe, sous couvert de soutien à la population se sont lancés dans la production de ces produits, augmentant ainsi, par effet de levier, leurs propres bénéfices.

Egalement, les commandes gouvernementales destinées aux professionnels de la santé ont permis à ces entreprises d'augmenter encore davantage leurs ventes.

L’histoire de You Lixin est édifiante à plus d’un titre. Selon des sources concordantes, ce chinois ignorait tout de la vente des masques jusqu’à ce que l’épidémie du Covid se déclenche à Wuhan. Pourtant, l’homme d’affaires n’a pas hésité à se lancer dans cette filière après avoir flairé un filon lucratif. La vente de ses premières machines-outils s’est faite dix jours après sa décision d’investir dans ce secteur.

Une autre conséquence de la pandémie de Covid a été la hausse des prix des matières premières. Il en a ainsi été de la toile utilisée pour produire les masques. De 1300 euros la tonne avant la crise, le prix de ce produit a flambé jusqu’à atteindre 62 000 euros. Vous vous demandez encore qui sont les vrais bénéficiaires de la crise sanitaire ? Vous connaissez la réponse désormais.

5 Le revers de la médaille

Parce que toute médaille à deux faces, et alors que certaines entreprises ont pu tirer leur épingle du jeu, de nombreuses autres ont été soit fortement impactées, soit ont dû mettre la clef sous la porte.

En se promenant dans les grandes villes entre deux confinements, on peut aisément se rendre compte du nombres de rideaux de fer tirés à jamais. Le tissu économique local a en effet été bouleversé, et un grand nombre de boutiques ainsi que de commerces dits non-essentiels ont fait les frais des différentes règlementations.

Il est de notoriété publique que le secteur de l'hôtellerie-restauration a été durement frappée, mais de nombreux autres secteurs tels que l'évènementiel, les commerces non-alimentaires, les acteurs culturels (cinémas et théâtres), le transport ont été fortement impactés.

Alors que les grands laboratoires pharmaceutiques annoncent un après l'autre l'arrivée de différents vaccins et leur prochaine mise sur le marché, que les Etats se sont endettés de façon hallucinante, il semble légitime de se demander quels seront les conséquences à moyen et long-terme. Alors que les grandes entreprises ont réussi à se réorienter afin de profiter de la manne, les plus petites ont été forcées de licencier à tour de bras voire dans le meilleur des cas de mettre la majorité de leur personnel au chômage technique.

Bien que les efforts sans précédents des différents gouvernements aient permi de sauvegarder certains emplois, les conséquences économiques de la pandémie ne se verront sans doute que dans plusieurs mois. La question est, quel sera l'amplitude de ces dernières ?

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